Améliorons l'accès à l'assurance après un cancer du sein

SCOR a mis au point un calculateur du risque de récidive "Vitae Breast Cancer"

Vitae Breast Cancer
Si on guérit de mieux en mieux du cancer du sein, l'accès à l'assurance emprunteur pour les femmes en rémission reste difficile. Le réassureur SCOR a donc mis au point un calculateur du risque de récidive, "Vitae Breast Cancer". Laurent Rousseau, Directeur général de SCOR, et Manuel Plisson, Head of biometric risk modelling and inclusive underwriting, en expliquent les enjeux et les atouts dans cette tribune publiée par L'Argus de l'Assurance

 

Chaque année, la journée mondiale de lutte contre le cancer du sein est l’occasion de rappeler les progrès considérables réalisés par la recherche sur le front des traitements et de la prévention. On y rappelle moins souvent que d’autres progrès restent à faire pour un retour à la vie normale après la fin du traitement. C’est ici que le rôle de l’assurance prend tout son sens.

 

Des difficultés persistantes pour s'assurer

En effet, si le cancer du sein reste le cancer le plus fréquent en France, devant le cancer de la prostate et celui du colon, on en guérit plus aujourd’hui que par le passé. Entre les cas diagnostiqués en 1990 et ceux diagnostiqués en 2015, le taux de survie à 5 ans est passé de 79% à 89%. Il s’agit là d’un progrès majeur. Mais de nombreuses femmes guéries du cancer du sein rencontrent encore trop souvent des obstacles alors qu’elles aspirent à retrouver une vie normale. C’est notamment le cas de femmes souhaitant acheter un bien immobilier. A l’épreuve que représente la lutte contre la maladie s’ajoutent des difficultés importantes pour obtenir une assurance emprunteur.

Le cancer est en effet une pathologie complexe et hétérogène, et présentant par conséquent un risque historiquement très difficile à évaluer pour les assureurs. Jusqu’à il y a encore quelques années, par principe de prudence et devant le risque significatif de rechute qu’il était à l’époque difficile de modéliser, de nombreuses patientes pourtant en rémission voire considérées par leurs propres médecins comme guéries, se sont vu refuser l’accès à l’assurance.

Aujourd’hui, des évolutions conventionnelles et réglementaires, mais aussi et peut être surtout les progrès considérables dans la connaissance de la maladie réalisés grâce à la recherche médicale et à l’analyse des données, permettent de repousser la frontière de l’assurabilité pour les femmes ayant guéri d’un cancer du sein.

 

Les progrès de la convention AERAS

Du point de vue réglementaire premièrement, la convention AERAS a permis de réaliser de nombreux progrès. Instituée en 2006, cette convention conclue entre les pouvoirs publics, les professionnels de l’assurance et les associations de malades a pour objectif de « favoriser l’accès à l’assurance des personnes dont l'état de santé ne permet pas d’obtenir une couverture d’assurance aux conditions standard du contrat. » Révisée à plusieurs reprises, cette convention a notamment été complétée en 2016 par l’introduction du Droit à l’Oubli. Celui-ci stipule qu’aucune information relative à une pathologie cancéreuse ne peut être demandée et utilisée par l’assureur si le traitement est terminé depuis plus de 10 ans (5 pour les personnes de moins de 21 ans) et si aucune rechute n’a été constatée. La convention AERAS a donc permis de proposer des solutions d’assurance à des personnes qui en étaient auparavant exclues.

Dans le même temps, les connaissances épidémiologiques des facteurs de risque de récidive et de mortalité du cancer se sont largement développées et peuvent maintenant être modélisées à partir d’importantes bases de données. Des bases de données publiques, parfois librement accessibles, recensant des informations à la fois démographiques, médicales, comportementales sur des durées longues et pour un grand nombre de patients, y ont amplement contribué. Pour le cancer du sein, il s’agit notamment de la base SEER (Surveillance, Epidemiology and End Results), couvrant près de 35% des cas de cancer survenus aux Etats Unis entre 1975 et 2018, et contenant des informations très précises sur l’évolution de la maladie au cours du temps (forme et emplacement de la tumeur, avancement au moment du diagnostic, traitements etc.).

 

L'apport de la data science

Une fois exploitées par des techniques de data science désormais répandues comme le machine learning, les applications liées à ces bases de données sont nombreuses. Elles permettent tout d’abord aux professionnels de santé, désormais familiers avec l’utilisation de calculateurs du risque de rechute, d’établir un protocole de soins le plus personnalisé possible au moment du diagnostic, se fondant sur la modélisation de l’évolution la plus probable de leur malade en fonction de facteurs cliniques, histologiques, moléculaires, génétiques etc. propres à chaque individu. De nombreuses solutions gratuites et libres d’accès ont été mises à disposition par des universités ou par des acteurs publics, comme la NHS au Royaume-Uni, qui a développé le calculateur « Breast Predict » avec l’Université de Cambridge. Ces solutions sont aujourd’hui communément utilisées pendant les consultations elles-mêmes.

De la même manière, ces innovations peuvent aujourd’hui aider les femmes une fois leur parcours de soin derrière elles, au moment où elles peuvent reprendre le cours de leur vie, en permettant de développer des solutions d’assurance plus inclusives. Grâce à la donnée et à une fine compréhension des travaux de recherche les plus récents, les sociétés de (ré)assurance sont en mesure de développer des calculateurs qui permettent de définir pour chaque individu avec un historique de cancer du sein son propre risque de récidive et de mortalité. La finalité de ces calculateurs est avant tout l’inclusivité financière, en complément de la convention AERAS : leur objectif n’est pas tant de diminuer le nombre de refus mais bien de proposer un tarif adapté aux caractéristiques de chacun(e).

De nombreux progrès restent évidemment à faire pour permettre aux femmes ayant guéri d’un cancer du sein de retrouver une vie normale. Mais dès aujourd’hui, fort de nos connaissances, nous disposons déjà de nombreux outils pour rendre l’assurance plus inclusive. L’utilisation de la donnée représente un enjeu majeur pour les assureurs. Un enjeu technologique dans un premier temps : la multiplication des données, et des techniques permettant de les faire « parler » transformeront notre métier. Un enjeu social aussi : la mutualisation « aveugle » des risques ne permet pas la structuration de produits assuranciels pertinents et utiles à la société. Un enjeu stratégique enfin : les assureurs doivent sans cesse s’assurer de leur contribution au bien commun. La santé de la planète et de ses habitants en est un absolument essentiel.

En savoir plus sur Vitae Breast Cancer
(en anglais)

 

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